| Chirurgie urbaine dans l’estuaire de la Corne d’Or | Institut des arts de la scène | Istanbul (Turquie) | Atelier Han Tümertekin | 2010 |
La thématique de l’intervention architecturale avait pour objet une opération de « chirurgie urbaine » dans le cadre de l’estuaire de la Corne d’Or à Istanbul, délaissé et négligé par les pouvoirs publics.

Le site proposé s’apparente à une enclave, cerné par les ponts Atatürk et Galata, la mer et la rue Tersane à double sens.
Cette étendue était vouée à devenir un parc dans les années 70 et plusieurs ilots de bâtiments avaient été détruits dans cette optique.
Ce projet d’espace vert a ensuite été abandonné par la nouvelle mairie et le site est actuellement laissé pour compte, dans un état de délabrement avancé où bâtiments vides côtoient petits commerces en tout genre.
Pour autant, les alentours du quartier ont récemment accueilli la venue d’artistes attirés par le cadre alternatif.
Le projet découle de l’analyse globale de ce site, en reconversion et en quête de réhabilitation de son tissu existant.
En effet, plutôt que de densifier une zone qui l’est déjà outrancièrement, la stratégie a été de tirer parti du bâti existant (en l’occurrence un ilot abandonné et composé d’une dizaine de bâtiments disparates dont un Han typique du 19ème siècle) en le considérant comme une coquille dans laquelle notre programme de lieu d’apprentissage et de représentation d’arts et spectacles se développe.
La vocation de cette opération est de réhabiliter le quartier par la culture en redynamisant sa vie aussi bien diurne que nocturne. L’ensemble est un institut dédié aux arts de scène, à une échelle et dont l’impact sont aussi bien locaux qu’internationaux, favorisant à tous l’accès et l’apprentissage de la culture scénique.


Afin d’exploiter au mieux les bâtiments existants, ceux ci ont fait l’objet d’un relevé photographique sur place, d’une modélisation 3D puis d’un travail en maquette à différentes échelles (1.100 puis 1.50) tout au long du processus.
Les façades sont conservées en l’état et renforcées à l’intérieur par du béton projeté, tout comme les dalles d’étages sont réemployées. Toutefois, les éléments existants se plient à leur nouvelle fonction et subissent des percements (circulation, double hauteur, transparence, etc.) lorsque le programme et la qualité spatiale l’exigent.



Le leitmotiv du projet a été de mettre en relation les bâtiments de l’ilot au service d’un programme commun : le bâtiment central d’accueil distribue ainsi 2 réseaux distincts : Un réseau technique au sol qui traverse les bâtiments existants et relient les différentes scènes par dessous entre elles, assurant la circulation des artistes, élèves, professeurs et techniciens au sein du complexe. Ce réseau est inaccessible au public et dissimulé la plupart du temps sous les gradins.


Un réseau public notamment emprunté par les spectateurs, leur proposant un parcours surplombant les scènes et des points d’arrêts sous formes de gradins.
Les bâtiments intégrant les scènes sont accessibles par une « promenade » depuis le bâtiment central. La circulation se fait également par l’extérieur des bâtiments, au moyen de plateformes et d’escaliers ancrés en façade.
La médiathèque est le seul bâtiment « nouveau » à intégrer l’ilot, il vient compléter le tissu urbain laissé vacant par une destruction ultérieure et témoigne de celle ci.
Entièrement vitrée, les deux murs que la médiathèque partage avec les bâtiments attenants sont laissés apparents, révélant l’existence et les stigmates (empreintes des escaliers, têtes de dalles, végétation, etc.) du bâtiment ayant occupé la parcelle précédemment.
Elle est en outre le point de rencontre du réseau interne et du réseau public et est également accessible par l’extérieur, puisque ses services sont à la disposition de tout un chacun.

Le bâtiment central est pensé comme le cœur du complexe. Il permet de se rendre dans chacune des zones de l’institut en empruntant ses coursives. Il assume aussi le rôle d’introducteur aux différents programmes proposés; sa double hauteur ainsi que les ouvertures vitrés (donnant alternativement sur scènes, réseau technique, espace vert et studio d’enregistrement) se comportent comme un prisme révélant des axes visuels sur les activités du complexe.

Les façades existantes s’apparentent à un décor de théâtre que les spectateurs longent depuis une coursive vitrée qui fait office de double peau du bâtiment.
La continuité visuelle est ainsi assurée tout le long de la promenade entre la coursive, les gradins et la scène, laissant la liberté aux visiteurs d’évoluer de spectacle en spectacle.

Les terrasses en gradins de la toiture du bâtiment central (dont les différentes hauteurs sont visibles en négatif à l’intérieur) accueillent un bar qui met physiquement en communication les toits des autres bâtiments et offre une vue privilégiée sur la Corne d’Or.
La discothèque est le second bâtiment autonome, autant accessible depuis l’extérieur par le bar au rez de chaussée, que par le réseau public à l’étage. Les pistes de danse en demi niveau s’articulent en hélice autour d’un noyau central extrudé où siègent les cabines des DJs de chaque étage. Salles de cours ainsi que locaux administratifs complètent l’ensemble du programme.